F - Les années 1970, la division indépendante et blockbuster

Publié le par François Declercq

L'horreur et son sous genre, le slasher
Introduction
Chapitre I: Le genre au cinéma, un terme flou
Chapitre II: L'horreur
  1- Une tentative de définir l'horreur
  2- L'univers du film d'horreur
  3- L'histoire du cinéma d'horreur
    A- L'époque muette
    B- Les années 1930, le début de l'ère du cinéma parlant
    C- Les années 1940, l'horreur underground
    D- Les années 1950, la domination de la science-fiction
    E- Les années 1960, une horreur nouvelle et la naissance du gore
    F- Les années 1970, la division indépendante et blockbuster
    G- Les années 1980, la décennie de l'horreur
    H- Les années 1990, la chute et la renaissance de l'horreur
    I- L'horreur du 21ème siècle

Chapitre III: Le slasher
  1- L'évolution du film slasher de Psychose à aujourd'hui
    A- Les fondements d'un genre
    B- 1978-1980, la naissance du slasher
    C- La première vague slasher
    D- La fin d'un genre ?
    E- La deuxième vague slasher
    F- Synthèse des trente dernières années
  2- Comment définir le slasher ?
    A- La structure narrative générale d'un film slasher
    B- La belle et la bête
    C- L'élément de choc
Chapitre IV: Le slasher et les autres sous genres
Conclusion
Annexes
F- Les années 1970, la division indépendante et blockbuster
L’horreur des années 1970 prend deux chemins bien différents, d’un côté les cinéastes indépendants des grands studios continuent sur la lancée des années 1960 et beaucoup de nouveaux talents verront le jour avant les années 1980, de l’autre côté les studios ont réalisé qu’il y a des possibilités de gagner d’énormes sommes grâce au cinéma d’horreur.

Pour commencer, le giallo continue et devient même un genre solide en Italie. Bava, bien sûr, est toujours le maître du genre mais contrairement à la décennie précédente, il va être rejoint par plusieurs jeunes réalisateurs impatients de s’attaquer à ce style de cinéma. En 1971, Bava réalise probablement le film le plus influent du mouvement giallo, La baie sanglante. Ce film va devenir la référence de nombreux metteurs en scène américains pendant les années 1970 et 1980. Deux autres cinéastes importants du mouvement sont Lucio Fulci (Le venin de la peur, 1971) et Sergio Martino (La queue du scorpion, 1971) mais ils ne parviennent pas à égaler le talent de Bava. Dario Argento, scénariste d’Il était une fois dans l’Ouest de Sergio Leone (1968), réalise son premier film en 1970, L’oiseau au plumage de cristal, un giallo aussi imprégnant que les films de Bava. Ce jeune réalisateur invente une toute nouvelle manière de filmer, ces meurtres, très présents à l’écran, sont presque des petits films à part. Il n’y a pas de continuité réellement et tout passe par la mise en scène des meurtres plutôt que par une histoire linéaire. Son style de développe dans les années suivantes dans ces films Les frissons de la terreur (1975) et Ténèbres (1982), considéré aujourd’hui comme le giallo des giallo et la fin du genre. Son film le plus important, Suspiria (1977), sort cependant du giallo et se base sur une histoire de sorcellerie dans une école de danse, mais le style d’Argento y demeure toutefois. Le meilleur moyen de constater le style propre d’Argento est à travers la version européenne de Zombie de George A. Romero, édité par l’italien. La version Argento et plus court de vingt minutes car il préfère découpé, de manière saccadé, les scènes violentes pour accroître l’impression de panique ainsi que les scènes servant à approfondir l’intrigue, pour lui le spectateur n’a pas le besoin de tout comprendre, des petits signes suffissent. A noter aussi la présence en Italie d’un cinéma de cannibalisme à la fin des années 1970 à travers des films comme Le dernier monde cannibale (1977) ou Cannibal Holocaust (1980), qui terrorise le monde entier, tous deux de Roggero Donato ou encore Le secte des cannibales (1980) d’Umberto Lenzi. Ces films se veulent le plus réalistes possibles et ont souvent un aspect presque de documentaire.

Aux Etats-Unis, quelques jeunes réalisateurs indépendants se lancent dans l’horreur. Wes Craven, fortement inspiré de l’horreur réaliste à l’italienne et des films érotiques sur lesquels il vient de travailler, réalisé un des films les plus terrifiants de l’histoire de l’horreur, La dernière maison sur la gauche (1971). Dans ce film, deux amies sont kidnappées, torturées, violées et tuées par une bande de délinquants, la famille de l’une des filles finit par faire justice à elle-même de manière barbare. Le film se rapproche tellement des films italiens que lors de la sortie américaine de La baie sanglante, le film de Bava adopte le nom de The House on the Left, Part II malgré le fait qu’il soit réalisé avant l’œuvre de Craven. La dernière maison sur la gauche marque en quelque sorte le début du genre qu’est le survival. Craven refait un tour dans le genre quelques années plus tard lorsqu’il réalise son deuxième film, La colline a des yeux (1977), film qui va encore plus loin dans les principes initiés par La dernière maison sur la gauche. Cela s’explique par la concrétisation du genre par le film Massacre à la tronçonneuse (1974) de Tobe Hooper. Hooper renforce l’idée que la violence doit être réelle et non justifiée tout en brouillant la limite entre le bien et le mal, créant alors un univers tout à fait inquiétant, de plus, on abandonne les effets sanglants et la musique renforcée. Au même moment né aux Etats-Unis le terme de snuff movies. Ces films sont filmés de manière clandestine et montrent des meurtres et scènes de tortures qu’on dit réels. Le réalisme du survival crée alors le doute chez le spectateur qui ne sait plus où se trouve la limite concrète entre la fiction et la réalité.

D’autres jeunes réalisateurs indépendants se lancent à leur tour dans l’horreur mais ne suivent pas les mêmes veines que ceux mentionnés plus haut. Brian De Palma, qui avait déjà réalisé quelques films durant les années 1960 mais qui ne sont en rien de l’horreur, décide en 1973 de réaliser Sœurs de sangs, un film évoquant des jumelles diaboliques, qui reprends une grammaire cinématographique typique de Hitchcock. En 1976, le même réalisateur met en scène la première adaptation d’un roman de Stephen King, Carrie au bal du diable. Ailleurs, le jeune David Lynch réalise Eraserhead en 1977, un film troublant évoquant l’industrie et ses effets sur le corps humain, Steven Spielberg met en scène une course poursuite périlleux dans Duel (1971) et Roman Polanski continue dans la même veine que Répulsion et Rosemary’s Baby avec son film Le locataire (1976). A noter aussi les films du réalisateur canadien David Cronenberg, notamment, Frissons (1975) et Rage (1977) qui sont dans la lignée des films gore des années 1960. D’un style différent de ces confrères, John Carpenter après sa comédie noire Dark Star –L’Etoile Noire (1974) et son film d’action Assaut (1976), tous deux futuristes, s’attaque à l’horreur pour la première fois en 1978 avec Halloween, la nuit des masques. Ce jeune réalisateur, qui se démarque par sa manière de diriger la caméra, vient de bouleverser le cinéma d’horreur. En effet, Halloween, la nuit des masques, va être à l’origine du genre slasher qui va dicter le cinéma d’horreur pendant la décennie à venir.

Parallèlement à cet éclos de réalisateurs indépendants, Hollywood, s’aperçoit du potentiel des films d’horreur, qui coûtent peu cher mais qui rapporte énormément, s’ensuit alors une série de films qui vont reprendre certains thèmes évoqués dans les succès des années 1960 afin de faire des profits. Il est utile de préciser que Hollywood veut avant tout rentabiliser ses films d’horreur et elle laisse alors la violence gratuite ainsi que le gore aux cinéastes indépendants. Le premier thème abordé reflète celui de Rosemary’s Baby, c’est la présence du diable. En effet, dès 1973 William Friedkin réalise L’exorciste qui traite d’une fille possédée par le diable en personne et trois ans plus tard, Richard Donner met en scène le premier volet de la trilogie de La malédiction (1976). Le deuxième thème est celui évoqué par Les oiseaux, à savoir l’animal qui attaque. En 1975, Steven Spielberg terrorise la planète entière avec son grand requin blanc, sa caméra immergé dans l’eau, le tout accompagné d’une musique stressante composé par John Williams. Les dents de la mer est un film doté d’un budget élevé pour un film d’horreur mais a remporté plus de $ 470 millions en entrées cinéma au niveau international. Joe Dante, quant à lui, réalise Piranhas en 1978, film évoquant l’invasion d’une horde de piranhas déchaînés sur les rives d’une fleuve fortement fréquentées. Ces blockbusters du cinéma d’horreur ont comme but de toucher le public le plus large, on traite alors des sujets accessibles à tous sans tout en limitant la quantité de violence visible à l’écran, même si le gore est plus ou moins présent, voire par exemple L’exorciste.

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